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Réflexions sur divers aspects de la religion

Éditions de L’ANARCHIE




Réflexions
sur divers aspects
de la religion



par
Jeanne Dervil


LA CREATION        

   Il y a environ deux siècles, dans une de ses tragédies, Voltaire écrivait :

“Les prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple pense,
Notre crédulité fait toute leur science.”

          Ce que Voltaire disait des prêtres s’applique également aux religions : elles n’existent et ne se soutiennent que par la crédulité de leurs adhérents. Très explicables et très rationnelles au début, elles perdent peu à peu ce caractère de logique et ont pour conséquence inévitable de tomber de plus en plus dans l’absurde à mesure qu’elles s’éloignent de leur point de départ. Le christianisme devenu le catholicisme ne pouvait manquer à la tradition. Ce n’est pas un culte primitif, et pour comprendre ses dogmes, si étranges à première vue, il faut remonter non seulement au judaïsme, son ancêtre immédiat, mais encore au védisme, et parfois jusqu’au chthonisme  ou culte de la fécondité terrestre, la plus ancienne religion connue.

          Quelle est la base du christianisme ? La création ex-nihilo c’est-à-dire de rien, et le péché originel. Dans les religions naturalistes fondées sur l’opposition  de la lumière et des ténèbres, l’idée de création est une de celles qu’on trouve le plus souvent exprimées : “Parais ô ! Brillant, parais dans ta splendeur et tu créeras les mondes, tu développeras les cieux. Parais, ô ! Brillant et par toi les choses deviendront visibles; une création nouvelle surgira du chaos de la nuit.” Ces images, et beaucoup d’autres de même nature, peuvent se lire à chaque page des Psaumes, ces poèmes hébraïques et dans les chants du Rig-Véda, un des livres sacrés de l’Inde ancienne.

          C’est en effet pour des peuples aussi ignorants des lois de l’astronomie que des autres phénomènes naturels, le retour de la lumière constituait bien une création : les choses qu’on ne voit pas ne saurait être, et lorsque après une nuit passée dans l’angoisse de l’incertitude et la terreur de l’obscurité, aryas et sémites percevaient les premiers rayons de l’aube, tout leur semblait nouveau, inconnu, de formation récente, tout avait pour eux le charme des objets que l’on a craint de ne plus revoir.

          De la manifestation séculaire de ce sentiment décrit avec une force et une abondance extrême est né par analogie ou par extension  toute la série des créateurs ou des créations disséminées  dans les différentes mythologies. Le Créateur, c’est le dieu lumineux, le soleil; la création, cette visibilité du monde extérieur que détermine sa présence. Mais tandis que les autres religions nous présentent le Créateur comme débrouillant  le chaos, qui n’est pas le néant, c’est-à-dire mettant de l’ordre et de la clarté dans un amas de choses confuses, le christianisme seul parle de création ex-nihilo.

          Elle se heurte à une foule d’impossibilités : un être, fut-il Dieu, ne pouvant tirer tout de rien. Et puis, admettre une création, c’est supposer qu’à un moment de son existence Dieu à éprouvé le besoin de modifier ou de compléter son oeuvre, puisque la création date de six mille ans et que Dieu existe de toute éternité. Or qu’est-ce qu’un Dieu qui se déjuge, qui n’est pas immuable dans ses conceptions, qui change d’avis ou de goût comme un simple mortel ?

          Toutefois, jusqu’au milieu du dix-neuvième siècle sans accepter comme vraie ou simplement vraisemblable la création religieuse, on pouvait se demander à quelle époque et de quelle façon s’est formée la terre.

          A cette question simple et précise une science, l’anthropologie, répond : La terre évolue dans l’espace depuis plusieurs milliers d’années. Elle a  été longtemps une nébuleuse, c’est-à-dire un globe de feu, un astre brillant et éclairant comme notre soleil. Ce qui le prouve ce sont les tremblements de terre et les périodiques éruptions des volcans. Pour que les cratères du Vésuve, du mont Etna et du mont Pelée vomissent des torrents de flammes, de cendre et de lave en fusion, qui détruisent en quelques heures des cités entières, il faut que leurs flancs recèlent des foyers incandescents dont la température se chiffre par milliers de degrés.

ABSURDITE DE LA CREATION INSTANTANEE

          Donc la terre a été nébuleuse. Après avoir brillé et brûlé dans l’espace pendant des milliers de siècles, elle s’est éteinte et refroidie. Nous ne connaissons pas les causes de ce refroidissement et lorsque la science se trouve en face de faits qui lui sont inconnus, elle avoue franchement son ignorance, à l’encontre des religions qui affirment toujours sans jamais fournir la preuve de ce qu’elles avancent. Mais le refroidissement terrestre ne s’est pas opéré tranquillement “comme celui d’une marmite d’eau bouillante qu’on a retirée du feu.”

          Les inégalités de température entre la partie extérieure, la plus exposée au rayonnement, et les surfaces intérieures ont produit des déchirures, des soulèvements, tout un ensemble de phénomènes géologiques que chacun peut vérifier. Par suite, les eaux se répandirent à la surface, glissèrent sur les pentes et se concentrèrent dans ces immenses cavités océaniques, où nous les voyons actuellement.


          C’est là au sein de cette humidité très chaude que naquit et se développa parallèlement la vie animale et la vie végétale. Il est facile de s’en convaincre en creusant la couche terrestre. Les géologues la divisent en cinq âges détermines par la nature des animaux et des plantes, dont on retrouve la trace ou les débris, dans les différentes roches. Au fond, tout au fond, durant la période archéolitique, on n’aperçoit que des algues, des fucus habités par des rhizopodes et des crustacés. L’époque néolithique (second âge) est caractérisée par l’immense agglomération des forêts de fougères aujourd’hui transformées en houille, sur lesquelles on peut suivre l’évolution des animaux terrestres et aériens : insectes et arachnides.

          L’âge suivant produit les conifères, les grands sauriens (crocodiles), les oiseaux et les premiers mammifères. C’est une période de grande activité vitale. Enfin pendant l’âge tertiaire ou cénolithique on recueille les premières indications relatives à l’existence de l’homme; ou du moins de l’animal dont l’évolution organique et intellectuelle doit plus tard faire un homme. Ces indices consistent en silex taillés et brûlés, en os gravés et incisés, en traces de feu, allumé intentionnellement. Voilà; ce nous semble une explication autrement forte, autrement concluante que la Genèse : Dieu créa le monde en six jours.

          A cette première démonstration, l’embryogénie, une science médicale, est venue ajouter la sienne. Si le couple biblique est né adulte, si l’homme n’est pas le dernier terme de l’évolution animale, comment expliquez-vous que le fœtus humain reproduise successivement  toute la série des transformations par lesquelles ont passé les êtres vivants. Chaque jour, dans les facultés de médecine et les amphithéâtres d’hôpitaux, le scalpel des professeurs, disséquant le cadavre de jeunes femmes mortes en état de grossesse, permet aux étudiants et aux étudiantes de suivre les différentes phases de la vie intra-utérine.

          Au début, l’enfant qui doit naître avec des organes extrêmement compliqués comme le cerveau, le cœur, les intestins, etc., n’est d’abord qu’un végétal  à deux ou quatre feuilles. Un peu plus tard, c’est un poisson, il respire avec des branchies. A deux mois, c’est un têtard, à trois un  quadrupède, et ce n’est guère qu’à quatre ou cinq mois, qu’ayant accompli sa période de transformation, il commence  son évolution psychologique.

          La différence entre les deux phénomènes est celle-ci : on appelle évolution la série de modifications par lesquelles passe un même être (l’homme évolue de l’enfance à la vieillesse) et transformation la série d’états différents qu’il traverse avant d’arriver à son complet épanouissement physique et mental.

          Avec la création instantanée dont parle la Bible, il n’y a pas de situation intermédiaire. Dès le premier jour de son éclosion, le fœtus humain devrait avoir l’aspect d’un homme en miniature, doué de chacun des organes de son espèce, organes minuscules assurément, mais complets et que la gestation n’aurait plus qu’à développer, à accroître progressivement.

          Au lieu de cela, il change plusieurs fois de forme, de milieu, de conditions d’existence et monte peu à peu les degrés de cette échelle zoologique qui a pour point terminus, l’être humain. Que nos contradicteurs nous fassent connaître les raisons de ce changement graduel, de cette amélioration continue, s’ils n’ont pas pour origines des transformations correspondantes, qui se se sont autrefois produites sur notre globe par le mélange des atomes et la combinaison des agrégats organiques. Nous attendons leur réponse.
TRINITE, INCARNATION, REDEMPTION

          Si le catholicisme est la seule religion primitive qui ait eu sa Vierge-Mère, le védisme et le judaïsme possédaient  chacun leur sauveur, leur Rédempteur, en la personne du dieu de la lumière (1) : Indra pour les Indous, Iaweh, pour les Hébreux. Le védisme et le judaïsme se sont développés parallèlement; l’un en Judée, l’autre dans l’Inde ou Hindoustan. Le védisme gardant toutefois sur le judaïsme une avance assez sérieuse. Mais, bien que le christianisme  soit né d’une erreur d’interprétation des Psaumes, ces poèmes sacrés du peuple hébreu, cependant nous prenons pour base de notre démonstration le védisme, parce qu’il présente avec notre culte infiniment plus d’analogies.

          Le védisme, devenu le brahmanisme, est la religion des Aryas, primitifs habitants de l’Inde, que la science ethnologique nous donne pour ancêtres. Comme tous les indigènes de l’Asie et de l’Afrique, les Aryas, au sortir du fétichisme, avaient longtemps adoré la terre (sous le nom d’Aditi), d’abord comme Vierge-Mère, créatrice et nourricière du genre humain, puis comme hermaphrodite et hétaïre : l’évolution religieuse étant partout identique à elle-même. Toutefois, par un enchaînement d’idées qui tenait à la nature de l’esprit et à des mœurs plus austères, ils firent, en dernier ressort, de la grande divinité hindoue la Mère-Epouse,, par son union avec Varuna (le ciel en enveloppant) et de cet hymen, une supériorité dans l’ordre moral.

          Il n’en eut pas moins pour conséquence de transporter progressivement de la terre au ciel la toute-puissance divine. Et dès lors, naquit et se développa, chez les misérables populations de l’Inde, un culte tout nouveau. Dans le chthonisme, la terre n’était pas seulement envisagée par ses adorateurs comme la base essentielle, mais comme la cause unique des choses existantes. La religion qui lui succéda admis deux principes : l’un salutaire et fécond, l’autre stérile et néfaste, l’un présidant à l’entretien et à la répartition des forces productives et l’autre aux phénomènes de la destruction.

          N’est-ce pas ce que nous montre encore le christianisme  : Dieu et Satan, le ciel et l’enfer, le bien et le mal y sont en rivalité, en lutte permanente, et ce dualisme moderne, résultante des mêmes conceptions philosophiques transférées dans un autre domaine, nous apparaît aussi simple et aussi rationnel que le fut longtemps pour l’Arya, l’antagonisme de la lumière et de l’obscurité. Aujourd’hui, lorsque nos paysans voient le soleil descendre à l’horizon, et faire place au crépuscule, cette constatation n’éveille en eux aucun sentiment d’angoisse. Ils savent bien qu’après une absence plus ou moins longue, suivant la saison, le soleil réapparaîtra  au point opposé et ils s’endorment confiants et tranquilles.

          L’Arya, lui, ne soupçonnant même pas les causes de ce retour quotidien, était glacé d’effroi aux approches de la nuit, et sa frayeur, compréhensible et violente, se traduisait en gémissements et en supplications “au roi du ciel”. “Ne nous abandonne pas, disait-il, prends pitié de nous, ô ! Brillant. Ne nous livre pas sans défense à la frayeur de nos ennemis et aux pièges des méchants.” Et, comme malgré tout le soleil s’enfonçait de plus en plus vers l’Occident, le malheureux redoublait de lamentations et de prières.

          Il vint cependant une époque où malgré leur ignorance du mouvement de rotation qui animait  la terre, les Aryas s’aperçurent que, ponctuellement, la lumière revenait chaque matin “créer les mondes et étendre les cieux.” Mais  loin de voir dans cette régularité l’effet d’une loi scientifique, ils l’attribuèrent à l’efficacité de leurs offrandes et de leurs invocations. Sous l’empire de cette croyance, un lien plus étroit les unit à leurs divinités, et Indra, le lumineux, qui avait succédé à Varuna, dans la ferveur et la confiance populaires, devint l’objet d’une enthousiaste adoration. Là-haut, comme ici-bas, le sort des souverains se décident par le hasard des circonstances et les révolutions de palais ne sont pas non plus très rares.

          C’est à ce point de son évolution que le védisme apparaît comme un des précurseurs moraux, voire comme un des descendants réels (bien qu’éloigné) du christianisme. Nos lecteurs pourront en juger par la description suivante, se rapportant à la principale cérémonie qu’on accomplissait dans l’Inde, au temps de Rig-Véda (2). Bien avant les premiers rayons de l’aube, les Aryas s’étaient rendus processionnellement au tertre où l’on avait construit le bûcher, pour offrir à Indra le sacrifice quotidien.

          Ayant fait trois fois le tour de l’enceinte sacrée, le prêtre (brahmane) s’approcha de l’Arani, espèce de petite charpente en forme de croix. Au centre, un trou était creusé (la Maya) dans lequel il introduisit un morceau de bois, taillé en pointe (le Pramantha) qu’une corde enroulée faisait mouvoir rapidement par un jeu d’archet. Quand la flamme parut au point de contact, les assesseurs la recueillirent sur des feuilles et des herbes sèches, en invoquant la coopération de Vayou (le vent). On versa sur cette flamme du beurre fondue et une liqueur très alcoolique (le Soma), puis les assistants se mirent à chanter : “Agni est née dans le sein d’une vierge, la divine Maya, par l’opération de Vayou. Agni est le sauveur des hommes. Il va dans le ciel réveiller son père Indra et lui porter nos hommages. Agni est l’Indra terrestre, comme Indra est l’Agni céleste.”

          Lorsque les assistants eurent terminé, le prêtre à son tour, entonna un hymne célébrant, non les louanges d’Agni, mais celles d’Indra. Appelant le dieu de la lumière au secours des malheureux, livrés par la nuit “au pièges et aux persécutions des méchants”, il énuméra tous les avantages que lui assurerait le maintien de sa protection. Trois fois encore il fit le tour de l’enceinte. Au dernier, l’Orient s’empourpra et le soleil parut à l’horizon, salué de cris d’allégresse et de chants de triomphe. Après cela, il nous semble bien difficile de nier qu’entre la conception védique et les dogmes de l’Incarnation et de la Rédemption, il y ait aucune différence appréciable.

(1) Les Anciens étaient convaincus que la lumière existe indépendamment des corps lumineux. Ne voyons-nous pas dans la Bible que le premier jour Dieu fit la lumière  : “fiat lux” et que ce fut seulement le quatrième qu’il créa le soleil, la lune et tous les luminaires du firmament.


DE QUELQUES TRINITES

          Jusque dans les moindres détails, (Agni comme Jésus ayant pour père terrestre le charpentier Shatri, constructeur de l’Arani,) et dans les expressions liturgiques, le culte aryen a servi de modèle au nôtre. Le sacrifice quotidien, c’est la messe catholique que le prêtre est tenu de célébrer chaque matin. Agni (de igni, le feu), et dont on a fait agneau, c’est Jésus le Sauveur du monde, Jésus qui a pris naissance dans le sein de la Vierge-Marie, par l’opération su Saint-Esprit, un souffle (le Vayou des Vedas). Comme Agni, Jésus monte au ciel (l’Ascension) et porte à son père l’hommage à notre amour. Puis, comme le feu védique, il redescend à la voix et à la parole du prêtre, pour remonter à nouveau et s’asseoir entre l’Éternel et le Saint-Esprit. La similitude est évidente. Nous allons nous convaincre que la Trinité chrétienne est encore inspiré du védisme.

          Dans les cultes de l’antiquité, le nombre trois joue un rôle important, parce qu’il symbolisait les trois sacrifices du matin, de midi et du soir, que l’on offrait aux dieux. C’est de là qu’il est devenu sacré. Déjà le chthonisme  aryen au moment où il fit de la terre, Aditi, l’épouse de Varuna, avait ébauché une triade divine en la personne des Adytias, fils d’Aditi et dieux de l’atmosphère.  Varuna, Mitra et Aryaman, distincts quant aux attributions, avaient toutefois  une origine commune et se confondaient dans l’adoration des hommes. Sur cette trinité primitive s’en greffa une seconde : Rudra, Parjanya et Twashtri, qui à son tour, en engendra une troisième : Indra, Vishnou et Vritra.


          Mais à mesure que les Hindous acquirent des connaissances assez nombreuses, et un développement cérébral suffisant pour établir l’identification des feux : terrestre et céleste, une autre trinité s’ajouta aux trinités antérieures, triple par ses effets, une par la substance. Agni, le feu du foyer, Vishnou, le feu di ciel, Rudra, le feu de l’éclair étaient bien trois feux différents si l’on considérait leur mode d’action et leur lieu de séjour, mais en somme c’était toujours du feu, qu’il brûlât et brillât dans le foyer du sacrifice, le firmament ou le nuage.

          En incarnant les trois principaux phénomènes cosmiques : électricité, lumière, chaleur, la trinité de nos ancêtres était fort rationnelle, puisqu’elle correspondait à un ensemble de faits que la science a, depuis, formulée en lois, c’est-à-dire dont elle a contrôlé et vérifié les causes déterminantes. La Trinité chrétienne, inintelligible dans sa définition, au point de vue mathématique, ne l’est pas moins dans le domaine de la psychologie. Et en effet, s’il est impossible d’admettre qu’un dieu, plus deux autres dieux, n’en fassent qu’un, on ne s’explique pas davantage q’un être, fut-il Dieu, se scinde, se sépare physiologiquement en trois éléments complets, également pourvus de chacun des organes nécessaires à l’entretien et à la conservation de la vie.

          Mystère, dit le prêtre. Oh ! oui, mystère ! Et cette formule qui n’éclaircit en aucun point le problème, suffit pourtant à la plupart des Européens, si fiers de leur savoir et de leur civilisation. La vérité est qu’en se substituant aux religions grec et romaine, filles ou sœurs du culte aryen, le christianisme, là comme ailleurs, s’est approprié des croyances très claires, très sensées, à l’époque où elles se produisirent mais qui ne correspondent palus à rien et dont une interprétation métaphorique fait autant d’obscurités, nous n’osons dire d’absurdités.

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LE PECHE ORIGINEL

           Cette légende que l’on trouve exposée tout au long dans le “Zend-Avesta”, livre sacré des anciens Perses, nous vient de plus haut et de plus loin encore. La religion assyrienne, qui date d’une époque bien antérieure, la reproduit également. D’où vient-elle ? Du chthonisme ou culte de la terre que tous les peuples de l’antiquité : Phéniciens, Égyptiens, Hindous, etc. ont pratiqué au sortir de l’animisme.

          En la rééditant à son tour le christianisme ne paraît pas s’être rendu compte du rôle assez étrange  qu’il fait jouer à l’Éternel. Quand on ne donne aux êtres que l’on crée, ni faculté de discernement, ni critérium de morale, il faut s’attendre à les voir tomber dans l’erreur et commettre des actes répréhensibles. Le contraire serait inexplicable. Mais replacé dans son milieu et son cadre naturaliste, le péché originel n’a plus ce caractère déconcertant et odieux. Nous avons dit qu’il vient du chthonisme ou culte de la fécondité terrestre. Dans ce culte, la grande divinité qu’on adore est la terre; mais la terre envisagée comme une Vierge, et comme une Vierge-Mère, créant tout, produisant tout parce qu’elle trouve en elle-même sa puissance créatrice et génératrice.

          A première vue, cette conception d’une Vierge-Mère, bien qu’elle ait persisté dans une foule de religions postérieures y compris le christianisme, paraît un peu singulière. Elle s’explique néanmoins lorsqu’on songe que, durant bien des siècles, l’homme et la femme ayant vécu isolés l’un de l’autre, nul ne soupçonnait le rapport qui existe entre l’enfantement et l’acte de génération. On s’imagine que produire des enfants était une fonction inhérente à la femme et qu’elle les mettait au monde exactement comme la poule pond des oeufs, sans qu’il fût besoin d’aucune intervention étrangère.

          Plus tard, lorsque la cohabitation de l’homme et de la femme permit de reconnaître qu’il n’y a pas de génération spontanée, une première transformation s’opéra au sein du culte. Et la terre, un peu déchue de son prestige antérieur, devint hermaphrodite, mot grec qui signifie avoir les deux sexes. Mais le jour où l’observation et la science, oh ! une science bien rudimentaire, firent découvrir qu’elle n’est qu’un simple réceptacle  des germes végétaux, et que la véritable source de fécondité réside dans la chaleur solaire et l’humidité atmosphérique, la terre tomba au rang des prostitués (hétaires) et un revirement complet eut lieu dans l’esprit de ses sectateurs.

          Avoir cru adorer une Vierge, féconde par elle-même et s’apercevoir que la coopération d’un agent masculin est indispensable à sa fécondation, quel désenchantement pour des populations incultes, réfractaires à l’indulgence. Et ce fut la constatation de ce phénomène, d’ordre physiologique, qui entraîna précisément l’idée d’une faute, d’une déchéance limitée d’abord à la déesse, mais englobant peu à peu dans la même réprobation toute l’espèce féminine.

          C’est ce qui a donné naissance au mythe de la séduction et de la chute d’Ève. Sans doute, il a subi des altérations  et, pour les besoins de la cause, l’ordre des faits se trouve inverti. En se laissant tenter, Ève a perdu le monde, et c’est Marie, la Vierge-Mère du début, qui le sauva en enfantant Jésus, sans cesser d’être Vierge, comme dans la croyance antique, la terre produisait tout sans culture et sans semence. Mais cela ne change rien au fond même des choses et la présence de Satan, la part qui lui incombe dans la perpétration du péché, concourent encore à la ressemblance. Le démon biblique, le serpent séducteur de la Genèse, c’est l’élément masculin, l’agent fécondateur du chthonisme, dont le contact souille et avilit la terre.

          Enfin, comme dans l’hétairisme, Ève malgré sa faute, Ève honnie, méprisée, n’en conserve pas moins son empire sur l”homme, grâce à l’attrait physiologique, au charme capiteux de son sexe. Nous pourrions, continuant notre étude, pousser encore plus loin cette comparaison. Toutefois, nous croyons en avoir dit assez pour convaincre les esprits non prévenus que, dans ses dogmes fondamentaux, le christianisme s’est inspiré des conceptions très anciennes dont il n’a pas plus compris le sens, que la portée morale.

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LA MESSE

          C’est la grande cérémonie du culte catholique, toutes les autres n’en sont que l’accompagnement, le corollaire naturel. Dans le langage pieux on l’appelle le sacrifice ou même le saint sacrifice de la messe. Pourquoi cette expression ? Parce que la messe a pour objet de reproduire les différentes phases de la Passion, en d’autres termes de faire endurer à Jésus les angoisses et les souffrances de son crucifiement. Nous avons démontré que les dogmes de l’Incarnation et de la Rédemption chrétiennes, ont leur source dans les conceptions du culte védique et que la Rédemption d’alors s’appliquait aux ténèbres, dont l’Indra et son messager Vishnou, délivraient les aryas.

          La messe catholique reproduit, non la Passion et la mort de Jésus, mais le sacrifice que ces mêmes aryas (et plus tard les hébreux) offraient à leurs divinités suprêmes. Indra dans l’Hindoustan, et en Judée, Iaweb. Tout l’atteste : les églises en forme de croix arani védique et orientées de façon à ce que le prêtre soit tourné vers le point où apparaît le soleil levant; les cierges allumés, même en plein jour et symbolisant le feu du bûcher; les ornements asiatiques dont l’officiant est revêtu, ; les génuflexions et les agenouillements, tout semblables à ceux du brahmane; les chants d’invocation, par lesquels on invitait le dieu à prendre part au festin servi, rien ne manque, ni l’encens, qui remplace le soma, et le vin du calice substitué à l’arva.

          Enfin, comment expliquer qu’on ait besoin de dire la messe dans chaque paroisse catholique et qu’il faille la dire tous les matins, si ce n’est pas une transmission et une copie de l’ancien culte solaire. Jésus est mort pour racheter tous les hommes. Son sacrifice n’a, ou n’a eu d’efficacité que pour vingt quatre heures, il était bien inutile de le crucifier. En outre le messe dite par un prêtre a son effet sur l’ensemble de la catholicité, et non sur tel ou tel petit groupe local. Par conséquent, il suffit qu’un ministre de ce culte la célèbre, pour que chaque membre, chaque adhérent de l’Église romaine, en bénéficie.

          Voilà, ce qu’au point de vue religieux, décèle une analyse impartiale de la cérémonie. Dans le domaine morale elle apparaît plus singulière et plus choquante encore. Si notre cerveau n’était façonné dès la plus tendre enfance a accepter docilement toutes les affirmations sacerdotales, nous serions certainement frappés, et révoltés de ce fait : que chaque matin un homme qui se dit le représentant, le ministre et le serviteur de Dieu inflige à son fils, dieu aussi, des tortures sans nom. Et cela, froidement, délibérément, comme on accomplit un acte méritoire.

          Dans la vie ordinaire, un ministre qui, journellement supplicierait son souverain, un serviteur bourreau et meurtrier incessant de son maître, d’un maître incarnant en lui la bonté, la douceur et les vertus les plus hautes, vous inspirerait assurément une aversion, mêlée d’horreur et de dégoût, et vous mettriez tout en oeuvre pour vous opposer à la perpétration de tels forfaits. Eh bien ! non seulement les fidèles sanctionnent de leur présence ce déicide quotidien, mais ils en vénèrent les auteurs, et ne permettraient pas que, sous un prétexte ou sous un autre, ils s’abstiennent un jour de le commettre. On n’est pas féroce et sanguinaire à ce point !

          Tant de singularités, de heurts, de contresens devraient attirer l’attention générale et montrer qu’on se trouve en présence d’une anomalie. Ce Dieu qu’on n’apaise que par l’immolation indéfinie de son fils; ce fils qui se laisse bénévolement mettre à mort, pourvu que le prêtre revêtu d’ornements et d’habits spéciaux prononce la formule magique, il y a là de quoi dérouter, avec les profanes, les esprits les plus clairvoyants. Mais lorsqu’on remonte à l’origine, aux manifestations et aux concepts  de ce culte aryen, d’une évolution si logique, tout change, tout se transforme et devient d’une limpidité extrême. La métaphore, qui n’existe pas pour l’enfant, est inconnue également de l’homme primitif. En assistant chaque soir au déclin, fort rapide dans les pays équatoriaux, de la lumière et du soleil, l’arya devait croire, et croyait réellement qu’Indra, vaincu et prisonniers de ses ennemis (les dasyous) mourait, non sans avoir engendré un fils qui viendrait comme lui, éclairer et réchauffer la terre.

          Et ce qui donnait à cette illusion les apparences de la réalité, c’est qu’au moment où le soleil se lève, on ne voit d’abord qu’un point rouge et lumineux qui grandit, se développe en émergeant peu à peu de la brume matinale. Au dieu nouveau, tout jeune, tout faible encore, il fallait donc des aliments copieux, des boissons enivrantes : armes sûres, infaillibles pour le combat qu’il devait livrer à ses adversaires. Et cela recommençait le lendemain, puis le jour suivant et toujours, parce que la lutte envers les géants de la nuit n’avait ni fin, ni trêve, l’obscurité les ramenant, sinon plus nombreux, du moins plus acharnés contre le brillant et lumineux Indra.

          C’est en conformité de cette tradition, pieusement conservée par les différentes migrations de la race aryenne, que notre prêtre catholique, fidèle et inconscient imitateur du brahmane, offre journellement un sacrifice au “roi du ciel”. Mais tandis que l’officiant hindou témoigne de sa vénération par l’apport incessant de mets et de libations de choix, tandis qu’il abreuve et sustente son Dieu, le clergé apostolique, après avoir tué le sien, s’en nourrit. Ignorance et aberration intellectuelle, voilà ce qui caractérise la célébration de cette messe, envisagée par les croyants comme une excellente préparation à la vie et à la félicité éternelles.


LES SACREMENTS

I

          Corollaire et sanction des dogmes religieux, les sacrements sont présentés au fidèles de tous les cultes comme une émanation ou une institution de la divinité. Ils revêtent ainsi un caractère sacro-saint bien fait pour frapper les masses et leur inspirer une vénération extrême à l’égard de ceux qui les administrent. Le calcul ne manque pas d’habileté. Tout sacrement correspond d’ordinaire à une phase de l’existence, qu’il purifie et se rattache plus ou moins directement à un dogme. Dans le catholicisme, le baptême correspond à la naissance et se rattache au dogme du péché originel, comme la pénitence et l’eucharistie à ceux de l’incarnation et de la rédemption.

          Qu’est-ce que le baptême ? D’après la définition du catéchisme, le baptême est un sacrement qui efface la souillure du péché originel et nous faits enfants de Dieu et de l’Église. Nous avons signalé avec pièces et preuve à l’appui, la provenance de ce péché originel, né du chthonisme, et qui eut pour cause initiale l’ignorance où étaient les peuples primitifs du phénomène de la reproduction, animale et végétale. Au fond des anomalies et des réticences de la Genèse, il n’y a pas autre chose : le péché originel, c’est l’acte de la génération.

          Dieu avait créé Adam et Ève dans un état de complète innocence. Mais poussés l’autre vers l’un par cet attrait physiologique qui, dans les groupements, aboutit au mariage, ils eurent peu à peu la notion du réel, et instruits ou conseillés par Satan, commirent le péché : c’était fatal. Seulement, lorsqu’on sert la question de près, on en vient vite à se demander, comme le Huron de Voltaire, pourquoi Dieu, réprouvant à ce point l’amour et les entraînements de la chair, avait créé deux sexes. Il lui était si facile de peupler notre globe en usant du procédé antérieur : tirer les hommes du limon de la terre et chaque femme d’une côte surnuméraire de ceux-ci.

          Ce qui démontre bien d’ailleurs que le péché originel réside tout entier dans ce que l’Église appelle si bizarrement “l’œuvre de chair”, c’est l’importance qu’elle attache à la présenter sans cesse sous le jour le plus odieux. Tous les grands docteurs du premier siècle du christianisme, toutes les lumières et toutes les gloires du culte romain ont déversé sur elle les foudre de leur éloquence, et de leur indignation. Jean, le disciple préféré de Jésus, et qui devait cette préférence, parait-il, à son état de virginité, donne dans le royaume de Dieu, le premier rang à ceux qui ne se sont point souillés avec des femmes (Apocalypse, XIV, 4, Mathieu XIX, 12) condamne formellement l’amour et le mariage. et les exclut du royaume messianique (2)

          Paul (1er au Corinthiens) développe la même idée et, comme les autres apôtres, soutient qu’ “il est avantageux pour l’homme de ne toucher aucune femme“. Saint Augustin (De bone conjugio) affirme que tout amour charnel, toute volupté est mauvaise en soi. Il fait l’éloge de la virginité et s’écrit : “Je voudrais que vous fussiez tous comme moi.” S’il permet le mariage, c’est comme pis aller (à cause de la fornication). Et là encore il est d’avis qu’ “il vaut mieux même pour ceux qui ont des femmes être comme n’en ayant pas.”

          Le Concile des trente a ratifié ces doctrines, toujours professées par l’Église : “Si quelqu’un dit que l’état de mariage doit être préféré à celui de la virginité et du célibat et que ce n’est pas quelque chose de meilleur et de plus heureux de demeurer dans la virginité et le célibat, que de se marier, qu’il soit anathème. (Concile Trident, session XXIV, canon 16)

          Au XIVe siècle, Pascal, prétend que le mariage est la plus périlleuse  et la plus basse des conditions du christianisme. Bossuet maudit la femme qui, en séduisant Adam, a introduit le péché dans le monde. Antérieurement, un pape, un saint, saint Sirice, dans une lettre aux évêques d’Espagne, avait bien qualifié l’amour d’une “immondicité”, la mariage une “pollution de la chair.” D’autre part, si nous considérons l’Évangile nous y voyons que la naissance même de Jésus est une protestation contre l’union des sexes. Pour lui épargner la souillure de la génération, Dieu lui confère le privilège de naître “par l’opération de l’Esprit-Saint”, c’est-à-dire sans père terrestre.

          Par la même raison, Marie ne cesse pas d’être vierge après l’enfantement, comme elle était restée vierge après la conception (quelle réminiscence  indéniable de la Vierge-Mère du chthonisme). Par la même raison encore, l’acte sexuel qui a donné naissance à Marie se trouve exempt de toute impureté. (Dogme de l’Immaculée conception). “Pour être logique, il faudrait concéder également cet avantage à la mère, à la grand-mère de Marie et à toutes ses descendantes, car enfin, si la source est empoisonnée, comment le ruisseau peut-il être pur ?” (Citation empruntée à l’Histoire Naturelle des Religions par Eugène Véron, 2 volumes, Paris 1885.)

          Mais en ce cas que devient le péché originel, et que devient le catholicisme ? Sans la perdition du monde par Ève, il n’était pas besoin, en effet, de sauveur, de rédempteur, et le christianisme se trouvait étouffé dans l’œuf. Voilà où on aboutit avec ces contes irrationnels, puérils, bons tout au plus à bercer l’imagination des peuples dans l’enfance, mais qui ne conviennent en aucun point à des sociétés dont l’idéal s’étaye sur le progrès scientifique, la culture morale et l’esprit d’examen.

II
          Si maintenant nous nous en tenons au simple récit de la Bible, notre conclusion est la même : il n’y a pas de péché originel, non seulement parce que le péché étant une offense de la créature envers son créateur ne peut être commis par des êtres inconscients pour qui n’existe pas, et ne saurait exister la notion, même rudimentaire, du bien et du mal, mais encore parce qu’en cette circonstance la culpabilité divine saute aux yeux. Que lisons-nous, en effet, dans la Bible ? Que Dieu, après avoir créé Adam et Ève, les plaça dans le paradis terrestre, qui était un jardin délicieux, où se trouvaient en abondance les fleurs, les fruits, les plantes les plus rares et les animaux de toutes espèces.

(1) Les hommes de ce siècle, dit-il expressément, se marient et sont donnés en mariage, mais ceux qui seront jugés dignes du siècle à venir, et de la résurrection des morts, ne se marieront point et n’épouseront point de femmes.
          Il leur permit d’aller partout, de disposer de tout et de s’attribuer le produit de tous les arbres, ne faisant d’exception que pour un seul:  l’arbre de la science du bien et du mal. Et, le leur désignant : si vous en mangez, vous mourrez, dit-il. Telle est la version de l’Écriture. Eh bien !  A l’encontre de ses rédacteurs, nous pensons nous, que si Dieu était résolu à défendre, sous peine de mort, de goûter aux fruits de l’arbre de la science, il ne devait pas le placer dans son Eden ou bien, ayant compris cette imprudence, qui frisait la préméditation de ne pas attirer sur lui l’attention du jeune couple qui peut-être ne l’eût point remarquer au milieu de cette multitude infinie de végétaux. Bien mieux, il envoie le démon ou tout au moins le laisse (sous forme de reptile) se glisser auprès d’Ève pour lui insinuer qu’en mangeant le fruit défendu, non seulement elle ne mourra point mais qu’elle et son époux deviendront semblables aux dieux ! (1)

          Dans ces conditions, il nous paraît difficile d’échapper au dilemme suivant : ou bien il n’y a pas eut de péché commis ou bien Dieu en est l’agent responsable. Pour réfuter l’accusation (au besoin pour la prévenir) les théologiens ont imaginé de prétendre que les desseins de Dieu sont impénétrables ou encore que plus une chose nous paraît absurde et échappe à notre entendement, plus cela prouve qu’elle est d’essence divine. Voilà en vérité, une argumentation simple et commode, à la portée de tous, mais qui a le tort grave de ne prouver absolument rien.

          Avant de faire à Dieu l’injure de traiter d’absurdes et d’incompréhensibles ses desseins ou sa volonté, il faudrait se souvenir qu’ayant créé l’homme à son image, et voulant se faire adorer par lui dans ses oeuvres, il ne peut lui avoir refuser l’intelligence nécessaire pour en saisir la grandeur, la beauté, les mobiles secrets. Malgré tout et bien que le péché originel révolte au même point les sentiments d’équité et les principes de la morale, il n’en est pas moins accepté des catholiques qui s’en lavent les mains pour le baptême. Malheureusement pour eux, le catéchisme nous informe que ce sacrement, s’il efface la souillure spirituelle du péché, n’en détruit pas les conséquences temporelles qui sont : la concupiscence, les misères de la vie, la maladie et la mort.

          Ce qui revient à dire que son efficacité est nulle. A moins de mourir très jeunes, catholiques et chrétiens perdent le bénéfice inhérent à cette purification. Sujets à la concupiscence, à la colère, à l’orgueil, ils tombent dans le péché, ce qui les rend passibles de l’enfer. Or, être damné pour la désobéissance d’Ève ou pour avoir enfreint un commandement de Dieu, une prescription de l’Église, qu’importe, la torture est la même, et le temps passé à souffrir d’aussi longue durée.


          Une autre réflexion que suggère le baptême est celle-ci : Comment un forfait aussi exécrable que le péché biblique et dont six mille années de châtiment n’ont pu éteindre ou même atténuer les terribles effets peut-il être racheté par ce simulacre d’ablution ? Ce n’est pas tout, le baptême ayant pour caractère d’effacer la souillure originelle, le recevoir à l’^^age adulte ou le faire administrer à ses enfants, implique donc la reconnaissance et la consécration formelle de ce souillure. Eh bien ! nous ne comprendrons jamais qu’une femme, une mère, puisse considérer son enfant comme criminel, et comme impur en naissant, c’est-à-dire souillure par le contact maternel pendant la vie intra-utérine.

          N’est-ce pas la meilleur preuve que les croyances, surtout chez la femme, sont irraisonnées, presque instinctives, et qu’elle ignore tout des choses soumises à son adoration. Plus instruite et plus développée moralement par une culture intelligente, elle repousserait avec indignation jusqu’à la pensée de cette purification baptismale, offensante autant qu’inutile. Elle se rendrait compte en outre que la mère qui fait baptiser son enfant à peine né, l’engage par-là dans une voie, où il ne serait peut-être pas entré de lui-même, et qu’ainsi elle dispose de sa pensée, de ses sentiments, de son avenir : ce que nul n’a le droit de faire sans le consentement préalable de l’intéressé.

          Oh ! Nous savons bien ce qu’elles ont coutume de répondre aux objections de cette nature : c’est que la préoccupation du salut de leurs enfants doit primer, à leurs yeux, toutes les considérations terrestres, et quand il est si facile de l’assurer, elles seraient bien coupables de montrer la moindre hésitation. Sans doute, mais encore faudrait-il avoir cette certitude. Elles ne l’ont pas (c’est tout au plus une espérance) et en admettant qu’elles l’eussent, leur conduite resterait encore inexplicable. Car enfin si l’on accepte que Dieu punisse des enfants pour une omission qu’ils ignorent et contre laquelle ils ne peuvent ni réagir, ni même protester, ce qui paraîtrait inique et odieux venant d’un humain, comment concevoir qu’en même temps on place au nombre des joies les plus ineffables pour la procurer aux petits êtres dont sa rigueur ferait des victimes ? On porte atteinte au plus sacré des droits : la liberté de conscience.

III

          Credo quia absurdum, je crois parce que c’est absurde, disait saint Thomas d’Aquin. Que de gens pratiquent encore cette maxime. Pour beaucoup d’autres, la religiosité est affaire de convenance, d’intérêt, de milieu social. Tout le monde est chrétien, tout le monde fait baptiser ses enfants, je fais comme tout le monde, est un axiome que l’on entend formuler bien souvent. D’abord, il est inexact que tout le monde soit chrétien, et le christianisme n’étant pas d’ailleurs une religion primitive, pour lui recruter des adeptes, il a bien fallu que ses promoteurs n’eussent pas, au même point, le souci et le respect de l’opinion. Ensuite, on étonnerait bien des personnes, pour qui faire comme tout le monde, est à la fois le commencement et la fin de la sagesse, en leur apprenant qu’aux premiers âges de l’Église, on ne baptisait que les adultes : Ce qui avait au moins le mérite d’être un acte conscient. Et la raison, direz-vous ? La raison est que le péché originel n’existait pas encore ou, si l’on aime mieux, était inconnu des chrétiens. Oui, tout étrange que cela paraisse, il faut bien se rendre à l’évidence. Jésus était mort pour racheter le genre humain, perdu par Ève, et ses apôtres, non plus que ses disciples, n’avaient pas soupçonné la cause déterminante de cette immolation volontaire. Ce fut saint-Augustin qui s’en avisa., vers l’an 340 de notre ère, et qui s’empressa d’en publier la relation. Comment fit-il sa découverte ? Nous n’avons sur ce point que des données très vagues. Mais tous les petits chrétiens morts entre le 1er et le IVe siècle durent aller en enfer : les limbes n’existant pas plus alors que le péché originel.

(1)Le pluriel Elohim est plusieurs fois exprimé dans la relation biblique. Iaweh s’écrie notamment : voilà que l’homme est devenu semblable à l’un de nous, connaissant le bien et le mal.
(2) Cela n’empêche d’ailleurs pas les mêmes théologiens de s’extasier complaisamment sur les splendeurs et les merveilles de la Création, les harmonies de la nature, etc. On pourrait leur répondre : si elles vous paraissent aussi splendides, aussi harmonieuses, elles ne le sont donc pas d’essence divine, autrement vous ne les comprendriez pas.
          Credo quia absurdum. Si les croyances religieuses n’étaient qu’absurdes, ce serait déjà fort regrettable, l’intelligence ne pouvant sous peine d’atrophie ou de recul, se nourrir d’absurdités. Mais elles ont, en outre, pour conséquence inévitable, de porter ceux qui les professent à l’intolérance, et la caste sacerdotale à la persécution. L’histoire de l’humanité abonde en faits, généraux ou isolés, qui le prouvent surabondamment.

          Pour nous en tenir à la question du baptême, il s’était fondé en Allemagne, vers 1520, au moment où s’établit le protestantisme, une secte religieuse, dont le nom seul était un programme. Ses membres s’appelaient anabaptistes et se rebaptisaient les uns, les autres à l’âge de raison. Leur chef, un nommé Jean de Leyde, homme d’une foi sincère et d’une piété ardente, prétendait fort justement selon nous, que le baptême étant un acte d’adhésion au christianisme, en même temps qu’un symbole, ne pouvait être administré à la naissance : le nouveau-né étant aussi incapable de comprendre la nature de l’acte, que la portée du symbole. Il affirmait en outre que l’engagement pris au nom de l’enfant de renoncer à Satan, à ses pompes et à ses oeuvres, avait besoin d’être renouvelé par lui, une fois adulte, c’est-à-dire quand ses facultés le rendaient apte à discerner et à choisir en toute connaissance de cause.

          Qu’il eût tort ou raison au point de vue théologique, la question est secondaire. Ce qu’il importe de remarquer, c’est que sa doctrine laissait intacts tous les préceptes et tous les enseignements de l’Écriture. Elle n’en souleva pas moins de colères violentes, de haines farouches au sein d’une population fanatique, surexcitée par l’ardeur de sa croyance et les prédications du clergé, que la secte nouvelle menaçait dans son influence, ses prérogatives, et frustrait par surcroît d’une partie de ses ressources. Les anabaptistes ne recourant à son intervention pour aucune de leurs cérémonies. Cela ne pouvait se tolérer. On résolut donc de sévir d’autant plus qu’avec l’éloquence et l’enthousiasme d’un apôtre, Jean  de Leyde espérait beaucoup de conversions.

          Déféré au tribunal ecclésiastique où d’ailleurs il ne se rendit pas, le chef des anabaptistes traqué, poursuivi comme un malfaiteur par les limiers du St-Office, fut enfin, après une héroïque résistance, arrêté dans la cathédrale de Münster, capitale de la Westphalie et livré à un horrible supplice. Or, il ne faut pas oublier qu’à cette époque un certain nombre d’édifices religieux, les cathédrales notamment, étaient des lieux d’asile, déclarés inviolables. Mais leur inviolabilité officielle n’empêcha jamais le clergé d’y faire saisir ses adversaires, qu’on livrait ensuite au bras séculier, c’est-à-dire au bourreau.

          Voilà comment l’Église entendait la tolérance, et pratiquait la charité, la fraternité inscrites dans l’Évangile : charité et fraternité qu’elle exercerait  aujourd’hui de la même façon, si elle possédait encore la suprématie du bon vieux temps. L’amour du lucre et l’amour de l’autorité, tels sont les traits distinctifs de toute religion dominante. Par esprit d’imitation ou de solidarité avec ses devancières, le catholicisme se les ait complètement appropriés.

IV

LA PENITENCE

          Bien que l’ordre adopté par l’Église pour l’énumération des sacrements, place la Pénitence après l’Eucharistie, en réalité c’est le second que reçoit un chrétien. Pour communier, il est indispensable d’avoir reçu l’absolution de ses péchés, et cette absolution n’est accordée par le prêtre qu’au tribunal de Pénitence, généralement appelé confessionnal. La définition du sacrement de Pénitence nous est encore donnée par le catéchisme.

Qu’est-ce que la Pénitence ?
C’est un sacrement institué par notre Seigneur Jésus-Christ
pour remettre les péchés commis après le baptême.
Quand est-ce que notre Seigneur a institué ce sacrement ?
Il a institué ce sacrement lorsqu’il a dit à ses apôtres :
Recevez les Saint-Esprit, les péchés seront remis à ceux à qui  vous les remettrez,
et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez.

          Malgré le ton affirmatif de cette déclaration, le sacrement de Pénitence et la Confession qui en est le prélude, ne sont pas d’origine chrétienne. On les voit figurer dans le paganisme, le judaïsme, la religion des Perses, etc. Seulement, la confession avait lieu en public, devant un tribunal ayant pour mission de prononcer, sinon d’appliquer la peine, et qu’on appelait pour cela le Tribunal de Pénitence. Ce que le christianisme peut revendiquer, c’est la substitution, à l’ancien état de choses, de cette confession auriculaire, si commode pour le pêcheur, bien qu’elle le place dans une grande sujétion, vis-à-vis du prêtre.

          Que la mesure ait été provoquée par un scandale comme l’insinuent certains apologistes de Rome, nous ne le pensons pas. Même en admettant qu’à la fin du quatrième siècle une jeune femme se soit publiquement accusée d’avoir eu des relations très intimes avec un prêtre, cet aveu, et le mouvement de réprobation qu’il souleva ne pouvait prévaloir contre une coutume et des habitudes d’esprit bien des fois séculaires. Ce qui est infiniment plus probable, c’est qu’en préconisant la réforme, évêques et prélats obéirent à des considérations d’un tout autre ordre. Connaître non seulement les fautes, mais les pensées, les sentiments, les passions les plus intimes et les plus secrètes des hommes et, par-là, disposer, à l’occasion, de la conscience ou tenir dans ses mains l’honneur, la liberté, parfois même la vie des grands de la terre, voilà ce qu’entrevit Rome dans l’institution nouvelle. Entre les mains d’un sacerdoce habile et sans scrupules, la confession a donné tout ce qu’en espéraient ses promoteurs. Grâce à elle, l’Église a vaincu bien des résistances, triomphé de maintes révoltes et soumis à sa domination les souverains de l’Europe entière. Avec le célibat ecclésiastique, on peut affirmer que ce fut son arme la plus redoutable.
          C’est qu’en effet, par le refus de l’absolution, qui entraînait naturellement l’exclusion de la table sainte, le confesseur pesait d’un grand poids sur la volonté et les décisions de son pénitent. Si l’arrêt prononcé semblait injuste ou trop rigoureux, l’intéressé devait le subir quand même, à moins qu’il ne fût assez audacieux pour en appeler devant un autre tribunal ou assez puissant pour oser une résistance, inutile et infructueuse dans la plupart des cas. Il y eut des pénitences célèbres et qui montrent bien le degré d’omnipotence et de présomption atteint par les papes et les princes de l’Église. La plus retentissante est, de beaucoup, celle qu’infligea Grégoire VII (le moine Hildebrand) à Henri de Hohenstaufen, empereur d’Allemagne, à propos d’une querelle misérable et mercantile, désignée historiquement sous le nom de querelle des Investitures.

          Au moyen âge (et de nos jours encore) cette dénomination d’investiture s’appliquait au droit que s’arrogeaient  les papes de sanctionner, c’est-à-dire de rendre valable et effective la nomination des évêques, nouvellement promus à la dignité épiscopale. Mais, comme toutes les choses de même nature, l’intervention pontificale n’était pas gratuite et se payait à beaux deniers comptants.



          Ce droit d’investiture, que s’étaient octroyés les successeurs de saint-Pierre pour alimenter leur trésor ans cesse épuisé, les souverains allemands le revendiquèrent à leur tour en qualité de chefs temporels  du clergé national. On conférait l’investiture par la remise aux évêques de la crosse et de l’anneau de leurs prédécesseurs, et, en recevant ces insignes, les nouveaux dignitaires faisaient don d’une somme d’argent proportionnée à leur fortune personnelle ou à l’importance du fief ecclésiastique  qui leur était attribué. On voit quelle fut l’origine de ce conflit d’un demi-siècle entre la papauté et l’Empire : rivalité d’influence et d’ambition, jointe à une rivalité financière.

          Il nous est impossible, dans le cadre restreint de cette étude, de relater, même sommairement, les différentes phases de la lutte entreprise. Disons seulement qu’après des alternatives de victoires et d’insuccès, l’empereur Henri IV, sommé de paraître devant un concile pour se justifier de l’accusation de débauche, de simonie et de blasphème portée contre lui, trouva humiliant, dangereux même pour son prestige, d’avoir à se défendre devant un tribunal où siégeaient beaucoup de ses vassaux. Il quitta donc Worms, sa résidence habituelle, traversa au cœur d’un hiver rigoureux les Alpes et la Haute Italie pour se rendre à Canossa, propriété de la comtesse Mathilde, où séjournait en ce moment le pape Grégoire VII.

          Arrivé là, il fit demander audience au pontife, espérant plaider assez bien sa cause pour que le pape lui donnât une absolution pleine et entière. Mais le représentant du Dieu de bonté, le serviteur du Christ, né dans une étable, et qui pardonnait ouvertement à ses meurtriers, refusa de le voir et de l’entendre. Le château de Canossa était protégé par une triple enceinte. La fuite de l’empereur fut laissée dans la première. On permit au monarque l’accès de la seconde, mais il dut y pénétrer seul, pieds nus, sous la neige et revêtu d’un habit de pénitent.

          Il y resta trois jours,, exposé à toutes les intempéries, contraint au jeûne le plus absolu et soumis à des mortifications variées. Enfin, le quatrième, grâce aux pressantes sollicitations de la comtesse Mathilde, Grégoire VII, jugeant d’ailleurs son rival suffisamment humilié et amoindri moralement, daigna lui accorder l’entrevue qu’il implorait. Toutefois, avant de passer condamnation sur ses fautes, et de l’absoudre officiellement  du crime d’avoir porté les armes contre le successeur de saint-Pierre, le pape lui imposa, outre des conditions très dures, une pénitence publique, destinée à bien mettre en lumière la suprématie de la papauté dans le domaine temporel, non moins que dans l’ordre spirituel.
          On peut juger par cet exemple des abus criants, auxquels donna lieu, pendant huit ou dix siècles, l’administration du sacrement de Pénitence...

ïïï

LA CONFESSION

          Tout a été dit sur les inconvénients généraux de la confession, tout, même les dangers que fait courir à l’adolescente, et à la jeune fille, ce tête-à-tête, plus ou moins fréquent, avec un homme que la discipline sacerdotale, aussi rigoureuse que la discipline militaire, contraint à un célibat perpétuel. L’empressement des mères à lui confier la direction morale de leurs filles, nous semble donc le plus éclatant défi jeté au bon sens. Car enfin de deux choses l’une, ou ce prêtre a violé son vœu de chasteté, et alors quelle garantie avez-vous contre la possibilité d’une infraction nouvelle ? Ou bien il le garde scrupuleusement, et en ce cas, il est inhumain de le soumettre à une lutte constante, et toujours périlleuse, entre le devoir professionnel et l’attrait physiologique.

          Aux époques de foi et de ferveur extrêmes, une telle inconséquence, explicable par l’action du milieu ambiant, ne surprenait et ne choquait personne. Tout ministre du culte, apparaissant comme élevé, par sa fonction sacro-sainte au-dessus des besoins et des passions inhérentes à l’humanité, devait pouvoir subir les contacts féminins les plus troublants, sans qu’un désir, une pensée charnelle l’effleurât. Aujourd’hui que des procès nombreux et des scandales retentissants ont montré aux plus incrédules que l’ordination n’arrête ni n’entrave les fonctions génératrices, cet aveuglement est inexcusable.

          Ce qui ajoute encore à la coupable inconscience des mères, c’est que les conditions, un peu mystérieuse et anormales dans lesquelles s’accomplit la confession, semblent calculées de manière à produire, sur l’imagination et sur les sens, une excitation profonde. Cette lumière douce et voilée que tamise les vitraux du sanctuaire; le silence et la demi-obscurité du confessionnal; la grille  très légère qui sépare la pénitente de son confesseur et n’oppose qu’une barrière insuffisante aux investigations du prêtre, il y a là plus d’éléments qu’il n’en faut pour prédisposer à la concupiscence, aux tentations malsaines.


          Devant la perpétuité de cet état de choses, qui apparaît comme un constant défi jeté à la raison, on se demande quelle idée se font la plupart des mères de leurs obligations morales. Qu’on nous permette, à ce propos, de relater un fait bien caractéristique, et dont nous pouvons garantir absolument l’authenticité. Une de nos très proches parentes avait une petite fille de sept ans, qui, selon la coutume établie, commençait à fréquenter le confessionnal. La seconde fois qu’elle s’y présenta, le prêtre, après l’énumération des petites fautes commises : distraction pendant la messe, oubli de la prière du soir, accès de colère, gourmandise, etc., dit à sa pénitente :

          “Mon enfant, vous êtes bien sur de n’avoir rien oublié ?” ¾ Je le crois, mon père  ¾ Cherchez encore. Par acquit de conscience, la petite fille s’interrogea très scrupuleusement. ¾ Je ne trouve plus rien, mon père. Le confesseur fit une petite pause. ¾ Mon enfant, reprit-il, vous n’avez jamais commis d’indécence ! C’était la première fois que la petite entendait ce mot. Comme le prêtre parlait bas, elle comprit innaissance. ¾ Mon père, je ne sais pas ce que c’est que des innaissances. ¾ Je ne vous parle pas d’innaissance, fit-il un peu durement. Je vous demande si vous n’avez jamais commis d’indécence. ¾ Mon  père, je ne sais pas ce que c’est que des indécences. ¾ Eh bien ! Je vais préciser. Vous ne vous êtes jamais mise nue devant des petits garçons ?

          Stupéfaite, la petite fille regarda son confesseur. ¾ Mais, mon père, quand je vais dans la rue, j’ai une robe, des jupons, un pantalon... Le prêtre l’interrompit. ¾ Mon enfant, vous avez des frères ? ¾ J’en ai un. ¾ Plus jeune ou plus âgé que vous ? ¾ Jules a bientôt neuf ans. ¾ Et sans doute vos petites chambres sont l’une à côté de l’autre ? ¾ Oui, mon père. ¾ Et le soir en vous couchant, vous causez, sans doute? ¾ Oui, mon père. Jules me raconte ce qu’il a fait à l’école, moi aussi. ¾ Et, tout en causant, vous vous déshabillez. ¾ Oui, mon père. ¾ Mon enfant, prenez-vous bien toutes les précautions nécessaires pour ne pas blesser la pudeur ? De nouveau, la petite fille releva la tête, et son visage prit une telle expression d’étonnement, que le prêtre n’osa pas insister. ¾ C’est bien mon enfant, dit-il, je crois que vous êtes très pure !!! Je vais vous donner l’absolution.

          Croire faire l’éloge d’une enfant de cet âge en


05/11/2008
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